LUCAS VIDAL – LES MAINS INVISIBLES

LES MAINS INVISIBLES 


ARTISTE:
LUCAS VIDAL 

DATE: 15.10 – 31.10

GRAPHISME:
TOMAS DI GIOVANNI 

IMAGES
© JAKOB VON SIEBENTHAL

Au fondement de la pensée capitaliste, Adam Smith développe la théorie de la main invisible selon laquelle les travailleurs, d’abord mus par leur intérêt personnel, seraient amenés à œuvrer pour le bien commun indépendamment de leur volonté. Avec ironie, les mains invisibles, ici gigantesques, sont figurées de manière cartoonesque. Elles nous font faces, l’une tendue vers le ciel, l’autre dirigée vers la terre. Liées, sans d’autres corps, elles représentent celui qui crée et celui qui travaille.Manipulant l’esprit, agissant à leur guise, telle La Chose dans la Famille Adams.

Pour les réaliser, l’artiste construit des moules en plâtre et une imposante structure en bois permettant de maintenir ensemble les parties de la pièce. Durant l’exposition, l’artiste y coulera de la pâte à madeleine, matériau final de l’œuvre. Pour la cuire, il fabrique, in situ, une étuve géante à l’aide de fours domestiques, de briques et d’un ventilateur ; réunissant en un même objet inventé des techniques de cuisson de différents âges et de différents usages. Le four, source de chaleur, est l’origine du processus, l’âtre de la création.

Par dessus sont disposées deux doudounes, comme deux présences fantomatiques, spectrales. La distance qui les sépare et leur gestuelle laissent indéfinies les intéractions, entre embrassade et affrontement. Les mains, les corps ont ici disparu et plusieurs espèces de champignons habitent désormais cette membrane inorganique. Censés s’y entre-dévorer pour survivre, ils y poussent de manière aléatoire et incertaine.

Par une approche réflexive, Lucas VIDAL décortique l’ensemble de son processus créatif, montre l’importance de lois physiques qu’il ne maîtrise pas et prend un risque : que cela ne cuise pas, n’advienne pas, se casse la gueule.

Enfin, reprenant la tradition des azulejos, deux carrelages sont fixés au mur parés de paroles du groupe Parliament. Incorporant dans leur musique tout un champ artistique populaire, allant du cinéma à la bande dessinée, ils déploient une imagerie comics dans leur texte, pochette d’album et show. Pensée en diptyque, comme deux vignettes d’une même planche, une bulle éclate sur la faïence blanche de la première pièce: I’am the subliminal seducer/I will never dance. Cette adresse trouve écho dans le second ensemble: You’re not alone/You’re in the party zone.

Cette exposition se découvre à tâtons, comme on avance pas à pas dans une caverne marquée par une odeur de renfermé, de moisissure de plus en plus marquée. Dédoublant systématiquement les formes, Mains invisibles, Mains figées, Mains négatives, ne rencontrent, finalement personne, laissant planer l’impression d’une absence, d’un isolement. Elles sont des empreintes, trace d’une présence passée, appel à une altérité future.